Au delà des polémiques récentes engendrées notamment par certaines dissonances (pour ne pas dire plus!) exprimées ici et là, au plus haut niveau, nous souhaitons l'exprimer haut et fort :
« Oui, la France dispose d'outils originaux et potentiellement performants, susceptibles, s'ils sont popularisés et bien utilisés, de contribuer à l'essor des investissements étrangers dans notre pays !
Le 9 Janvier dernier, le Conseil des Ministres adoptait une résolution relative à l'attractivité, « une ambition partagée pour renforcer l'emploi et l'investissement en France ».Un Conseil Stratégique de l'Attractivité devrait remettre un rapport à la fin du semestre.Et un nouveau « Passeport Talent » est initié..
En fait, dès 2009 ,le gouvernement de l'époque validait, via un décret du 11 Septembre, la « carte de résident pour contribution économique exceptionnelle ».On en connaît le principe:
« Accorder une carte de résident de 10 ans à tout investisseur non européen s'engageant à créer ou à sauvegarder au moins 50 emplois sur le territoire français, ou à effectuer sur ledit territoire un investissement en immobilisations corporelles ou incorporelles d'au moins 10 millions d'euros ».
La cible : les entrepreneurs non européens. Ces entrepreneurs existent ! Ils disposent de moyens de financement conséquents,, et souhaitent investir, à titre personnel, en France, dans des actifs productifs, pérennes et non spéculatifs. En contre partie de leur investissement dans notre économie, certains souhaitent effectivement bénéficier de la carte de résident économique, véritable « Passeport pour les affaires », pour se rendre librement en France et dans l’espace Schengen, ouvrir des comptes bancaires, créer des sociétés en France, s'intéresser à des biens productifs créateurs d’emplois. S'ils n’ont pas obligatoirement vocation à résider en permanence en France, ils paieront naturellement des impôts sur les bénéfices qu’ils réaliseront.
A titre de témoignage, l'un des signataires de ces lignes a pu , dans ce contexte, via son réseau international, identifier plusieurs dizaines de candidats investisseurs intéressés, d’origine géographique très variée.
Force est de constater, (et leur nombre progresse) que certains ont malheureusement décidé récemment de donner une suite favorable ...à des programmes concurrents, au Canada et en Grande Bretagne tout particulièrement, faute de lisibilité de notre programme.
Un premier constat : pour attirer l’épargne internationale afin de financer ses investissements productifs, la France a besoin d’améliorer ses dispositifs existants méconnus ou totalement sous exploités par manque de visibilité ou d’implication de l’Administration dans la promotion du dispositif.
En effet de nombreux programmes existent dans le monde pour attirer les talents et les investissements d’entrepreneurs. Par exemple, le Wall Street Journal annonçait en Mars dernier que 150 000 Chinois avaient bénéficié de ce type de programme et avaient investi dans les pays qui en faisaient la promotion (pour l’essentiel, les US, Canada et Royaume-Uni). Des organismes spécialisés dans le conseil en résidence économique indiquent que 30 % des entrepreneurs ayant bénéficié d’un programme de carte de résident économique dans un pays, continuent d’investir dans ce même pays.
Depuis le décret du 11 septembre 2009 et la création du principe de carte de résident économique pour contribution exceptionnelle, la première difficulté pour un candidat non européen est de trouver une banque française acceptant de s'investir dans la procédure « Lutte Anti Blanchiment » pour justifier de l’origine de ses fonds préalablement à la réalisation de son investissement dans notre économie.
Dans le prolongement des rapports Gallois et Berger-Lefebvre, la mise en avant d’un dispositif d’incitation pour orienter au mieux l’épargne des pays émergents pour l’investissement dans le non-côté français, et une impulsion politique forte pour le promouvoir à l’international, peuvent débloquer le secteur du capital investissement dont la situation actuelle met en péril la capacité de la France à impulser les projets d’entreprises audacieux, sources de croissance et d’emplois.
Un second constat : Les banques françaises refusent presque systématiquement ce type de demandes si le candidat ne s’engage pas à transférer des capitaux significatifs sous gestion en plus de l’investissement qu’il souhaite réaliser dans notre économie. En effet, pourquoi une banque irait engager sa responsabilité pour servir de «boîte au lettres» pour investir dans des biens productifs qui ne lui rapporteront rien. Or si l’attractivité de la France pour les entrepreneurs non-européens est indiscutable, leur accueil est très loin de la réputation historique de notre pays et fait les beaux jours des économies anglo-saxonnes depuis des décennies.
Un troisième constat : beaucoup de moyens existent pour accueillir des entreprises et les accompagner dans leurs investissements en France, mais les entrepreneurs eux-mêmes ont été oubliés.
Dans ce contexte, il nous semble donc pertinent de mettre en oeuvre une présentation claire du dispositif à destination du public concerné, de centraliser les candidatures à travers un guichet unique pour le traitement des dossiers et de l’origine des fonds des candidats ,et d'adapter l'accueil qui leur sont réservés en rapport avec le montant des investissements productifs demandés.
En conclusion, au plan théorique, le programme français de carte de résident économique est attractif. Nous avons eu l'occasion de le vérifier nous mêmes, publiquement, lors du Forum de Dubaï du 20 Novembre dernier, devant plusieurs centaines de participants et, depuis lors, celle d'en assurer la promotion dans divers pays cibles identifiés (CEI, Moyen-Orient, Brésil, etc.).
Mais, en pratique, notre programme hexagonal est en l’état inefficace en tant que véritable outil de financement de notre économie nationale.
Avec un programme adapté, le potentiel de candidats investisseurs non-européens pourrait être raisonnablement évalué à 3 000 par an (au même niveau que notre principal concurrent potentiel, le Canada). Les investissements correspondants qui seraient réalisés par ces non-européens pourraient être compris entre 5 et 10 milliards d’euros par an sans aucune contre partie autre que la délivrance d'un « Passeport pour les affaires ».
Le Gouvernement vient d'afficher sa volonté d 'actualiser ces programmes .
Il serait, en effet, plus que dommageable, à tous égards, de manquer semblable opportunité.
Jacques Soppelsa
Président honoraire de l'Université de Paris I, Professeur en Sorbonne
Franck Ladrière, PDG « Axone Invest ».